"Le choix de Robert Levin séduit par son originalité: jouer chacun des vingt-quatre Préludes et Fugues du Premier Livre du Clavier bien tempéré sur l′instrument qui, à son sens, sied le mieux à leur caractère: clavecin à un ou deux claviers, orgue, clavicorde. André Isoir ne déclarait-it pas récemment dans Classica que Bach, maître de tous les instruments à clavier de son époque, désirait sans doute un autre instruments que le clavecin dans certains pièces de recueil? Tout l′intérèt de la version de Levine vient de cette variété instrumentale et de belles réalisations. Certains choix peuvent prêter à discussion, mais l′interprète les defends toujours avec conviction. Quant à Evgeni Koroliov, il nous touche une fois encore en restant fidèle à son beau piano à la sonorité si fine. Les oeuvres ne semblent alors pas appeler d′autre instrument que le piano. Koroliov tente cependant de singulariser les diptyques, en résistant à la tentative de les présenter comme un grand cycle (comme le fait Glenn Gould, dans une certaine mesure), il joue avec maîtrise et intelligence, soulignant la poésie lyrique de chaque pièce, sans pourtant s′y appesantir. Les Fugues, prise dans des tempi souvent assez lents, éclairent moins la linéarité de la polyphonie qu′elles ne jouent sur les réponses et dialogues entre voix. Alliant certains aspects motoriques de la vision de Glenn Gould à un jeu plus subjectiv, plus sensible, cette très belle version rejoint au sommet de la discographie celle du pianiste canadien, imbattable du point de vue de la clarté polyphonic (et du swing, lequel peut gèner) - aucune des belles versions de Fischer, Gulda ou Tureck ne bénéficiant d′une qualité d′enregistrement comparable. Koroliov devient ainsi une véritable alternative à l′hégémonie gouldienne."
Stéphan Vincent-Lancain
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