Interpréter les quatuors à cordes de Wolfgang Amadeus Mozart autrement que dans une perspective informée historiquement : est-ce tout simplement possible de nos jours ? Bien évidemment ! De toute façon, il est probable qu’aucun instrumentiste classique sérieux n’a pu échapper à l’influence de cette pratique, d’une façon ou d’une autre. Nous ne parlons pas seulement de remonter aux éditions originales des partitions (Urtext) ou du choix des instruments. Cette influence se retrouve dans les plus petits détails de phrasé, où les interprètes ne peuvent tout simplement se permettre ce qui se faisait jusqu’alors, même de façon inconsciente. Elle est issue de l’écoute de nombreuses interprétations.
Bien sûr, le Quatuor Auryn est lui aussi soumis à ces influences. Et si, malgré cela, ses interprétations semblent conventionnelles, c’est une illusion ; le style de ses instrumentistes ne s’inscrit plus dans la pratique conventionnelle de l’interprétation moderne. Les musiciens se réfèrent à un style de jeu qu’on pourrait qualifier « d’historique », mais d’une façon tout à fait différente – celle d’une génération musicale aujourd’hui éteinte. Leurs modèles et professeurs étaient le Quatuor Amadeus et le Quatuor Guarnieri. Les membres du Quatuor Auryn ont été « socialisés » musicalement à une époque différente de celle où l’ont été des musiciens plus jeunes, et ils ont choisi de ne pas mettre de côté les sensibilités esthétiques acquises dans leur jeunesse comme s’il s’agissait de vieux habits démodés. Ils aiment le beau « vieux » son des cordes et maintiennent vivante cette tradition, mais avec la diligence qu’on attend de musiciens d’aujourd’hui. Le résultat est une musique d’une beauté intemporelle. Ce nouvel enregistrement des 6 quatuors dédiés à Haydn par Wolfgang Amadeus Mozart en fournit un exemple impressionnant.